dimanche 20 février 2011




Il se tenait en retrait dans un des coins de la chambre défraîchie,

son regard plissé se perdait comme à l’habitude
dans les méandres floraux du papier peint.
Il avait toujours trouvé dégoûtant ce papier peint.
Des gros Dahlias pourpres qui se répétaient en bouquets sur les murs, avec lourdeur.
Des petits tas d’onglets de boeuf sur l’étal d’une boucherie.
Il revoyait Yvan, hilare en haut de son échelle avec son rouleau,
étalant les motifs comme du steak tartare,
les mains pleines de colle.

“T’aurais du choisir les Chrysanthèmes”,
pensa Vladilen en se râclant la gorge.
Un sourire coquin commençait à relever les coins de sa bouche,
son humour délicieusement sournois revenait à la charge,
alors que la vieille Agneska sanglotait bruyamment
en tenant, pathétique,
la main du défunt.

Vladilen avait envie de rire.

Ses yeux,
comme deux petites amandes rabougries,
se posèrent avec tendresse
sur le visage de son ami,
si beau de plénitude.

Il lui sembla qu’un sourire léger,
imperceptible s’était dessiné sur sa bouche pâle,
que sa large moustache frissonnait, prête à ouvrir le bal,
prête à entraîner dans son clignement,
le rire profond, le rire spectral, le rire ondoyant.

Ce rire d’homme des montagnes fripon et caverneux,
ce rire de vieil enfant au parfum de pipe,
ce rire qui jaillissait comme un éclat,
et faisait couler sur le coeur de Vladilen
un bon bain chaud.

Ils étaient entre les arbres, haches à la main,
et leurs rires mêlés inondaient la forêt,
de la fumée sortait de leur bouche,
la vie, la joie, l’amour sortait de leur bouche,
ils riaient par -30.

Vladilen regardait Yvan.
Au coin de ses yeux, ses rides d’expression,
sillons d’une terre familière, si souvent labourée,
semblaient s’être infiniment creusées,
prête à modeler cette forme que Vladilen aimait tant.
Celle du regard arc en ciel.
Les yeux d’Yvan, quand ils riaient,
dessinaient en se fermant
deux petits arcs en ciel.

Vladilen pleurait. Sa main tremblait contre le mur.
L’épaisseur du silence le traversait.




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