lundi 21 février 2011

La grâce de solitude



Les solitaires aimantent le regard,
on ne peut pas ne pas les voir...(...)

Il y a une beauté de l'état d'abandon, de nonchalance,
de vide, de vague où se trouve un visage pris dans la solitude,
ou pris dans une pensée, dans une attente.


C'est comme une fenêtre qui s'ouvre soudain
et au bord de laquelle j'aurais envie de me pencher...
C'est un état presque vertigineux. (...)

Je suis extrêmement touché, je suis même bouleversé (...)
dés que je perçois une once de solitude dans ce monde
ou dans une personne, dans la présence de quelqu'un.


Même si cette solitude n'est pas connue de la personne,
car il y a des états de détresse, mais aussi des états de joie,
qui traversent les gens, qui nous traversent et qu'on ne connaît pas,
qu'on éprouve même pas.


Ils existent, ils viennent, ils nous traversent,
et ils sont hors conscience.

C'est seulement quand on est à l'extérieur que l'on peut parfois,
à certains moments, les voir. Et quand j'assiste à ça...

Ce qui me touche chez l'autre est toujours lié à un état de solitude.
Et cette solitude ne peut apparaître (...) que dans un état de dénuement.

Il y a quelque chose d'un peu faible, d'un peu sans défense qui est donné à voir.

(...) C'est la simplicité vivante et faible de chacun.

Quand elle est laissée telle qu'elle, quand elle est laissée à voir.
Quand enfin quelqu'un se débarrasse de ses épaisseurs
qui sont de pauvres armures : le savoir, la conscience de soi,
la bienséance parfois, l'habitude, toutes ces choses qui servent d'écrans,
de murailles, de vêtements lourds que l'on met sur roi.


Quand à un certain moment tout ça tombe, la solitude est alors entière,
et en même temps c'est la fraternité qui est là. (...)

Je sais à ce moment là, que je suis fait comme lui, de la même matière.
Perdue exposée, faible...et lumineuse, irradiante."


La grâce de solitude,
Dialogues avec Christian Bobin




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